Je tiens à préciser d’emblée que le qualificatif « fictif » n’émane pas de moi. Ce mot « fictif » revient assez régulièrement dans les PV d’audition relatifs au dossier des emplois dits de cabinet de la Région pour la période de 2015-2020. J’en veux pour preuve un mail adressé par une contractuelle (devenue par la suite conseillère régionale) au président Robert. Un mail daté du 21 juillet 2016. Celle ci écrit (je vous passe les fautes d’orthographe et l’absence de ponctuation) : « Bonjour, normalement je suis affecté dans ton service donc je me dirige vers toi comme tu sais j’ai un contrat fictif depuis décembre 2015 je m’ennuie a rien faire du coup je voudrais mettre un terme à mon contrat région ! Je souhaiterais une rupture de contrat pour pouvoir bénéficier des assedics le temps pour moi de retrouvé du boulot ».
Comme vous pouvez le constater, j’ai pu jeter un œil sur les PV d’audition – de gros pavés – réalisés dans le cadre de cette enquête menée, sous la houlette du parquet de Saint-Denis, par les enquêteurs de l’OCLCIFF (Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales). Une enquête ouverte à la demande du Procureur de la République Eric Tuffery suite à une saisie de la Chambre régionale des comptes (CRC). Laquelle avait contrôlé les comptes de la Région pour la période de 2015 à 2020 concernant les Ressources humaines (RH), du temps donc de la deuxième mandature du président Didier Robert.
338 procès verbaux et 78 scellés dont 20 scellés numériques : l’enquête est bouclée concernant les emplois de cabinet de la Région
Pour résumer, la CRC avait noté que le contrôle des comptes de la collectivité régionale avait permis de mettre en exergue « de nombreuses anomalies dans la gestion du personnel ; Certaines étant susceptibles de constituer des infractions pénales ». Et la Chambre de citer : « les dispositifs de contournement du plafonnement du nombre de collaborateurs de cabinet pour recruter des personnes proches ou utiles politiquement au président de Région sont susceptibles d’être constitutifs de l’infraction de détournement de fonds publics au titre de détournement de leur emploi, mais également quant aux doutes pouvant être émis sur le caractère effectif de l’exercice de leurs fonctions pour un montant annuel estimé à 1,4 million d’euros en 2020 ; Le détournement des procédures de recrutement de contractuels sont susceptibles de constituer des faux en écriture publique ; Le recrutement de personnes ayant un lien d’intérêt politique avec le président de Région est susceptible de constituer des prises illégales d’intérêts ».
Il y a eu des perquisitions, des auditions… Plusieurs collaborateurs de cabinet (chargés de mission et/ou conseillers techniques) sont passés à la moulinette des questions. Leurs noms figurent dans les dossiers d’instruction. Nombre d’entre eux ont été entendus, certains à titre de témoins. Je vous en reparle dans un instant mais sachez que je ne pourrais pas tout vous relater car les dossiers représentent plusieurs kilos de paperasses. L’enquête judiciaire est bouclée depuis décembre 2022. Tout a été transmis au parquet. Tout, c’est-à-dire, 338 procès verbaux et 78 scellés dont 20 scellés numériques.
La Procureure de la République Véronique Denizot a déjà laissé entendre à la télé que cette affaire devrait être « audiencée » en Correctionnelle au premier semestre de 2024. Le PV des auditions de confrontation entre Didier Robert, Vincent Bègue (le directeur de cabinet), Mohamed Ahmed (le DGS) et Afzal Patel (le DRH), m’a particulièrement interpellé. Ils se sont tous, plus ou moins, rejetés la balle concernant le recrutement de ces fameux « collaborateurs de cabinet ».
On pourrait résumer en disant : « c’est pas moi, c’est lui ! ». Comme si ces chargés de mission et/ou conseillers techniques avaient tout simplement atterri sur la pyramide inversée en tombant du ciel, par le fait du saint esprit. Je vous en dis un peu plus dans un instant.
Le procès, comme vous le savez, devrait se dérouler dans le courant du 1er semestre 2024. C’est la Procureure de la République qui l’a dit à la télé. En tout cas, l’enquête policière menée par l’OCLCIFF (Office Central de Lutte contre la Corruption et Infractions Financières et Fiscales) est terminée depuis décembre 2022. Tout a été transféré au Parquet de Saint-Denis.
Yoland Velleyen recruté par le cabinet aux Relations internationales »
La Chambre régionale des comptes, dont un rapport a été le point de départ de cette enquête judiciaire, avait pointé en 2021, 31 recrutements de chargés de mission ou conseillers techniques posant problème à différents niveaux du temps où Didier Robert présidait la pyramide inversée, notamment durant sa deuxième mandature (2015-2021). Toutes ces personnes ont été passées à la moulinette ; Elles ont été entendues par les policiers. Mais combien seront-elles, au final, à comparaître à la barre du tribunal Correctionnel ?
Hormis la Procureure, personne ne peut le dire pour l’instant. Peut-être une petite dizaine. Dans les PV d’auditions que j’ai reçus, il y a des noms qui reviennent le plus souvent. Celui par exemple de Yoland Velleyen (ancien élu de Saint-Paul) embauché par le cabinet de Région et qui explique avoir signé un contrat pour officier dans le domaine des relations internationales. Or, lui même reconnaît devant les enquêteurs qu’il n’a pas les compétences pour ce poste d’autant que Vincent Bègue (aujourd’hui DGS de Bruno Domen à la mairie de Saint-Leu) lui avait assuré qu’il travaillerait dans le domaine de la Culture.
Interrogé par les policiers, Didier Robert signale que Yoland Velleyen a été recruté pour la réalisation de la Maison du Maloya, du Moraing et du Marronage et que «ces dossiers ont abouti dans toutes leurs plénitudes… ». Concernant « les manquements » dans « les procédures de recrutement », Didier Robert explique que «ces questions sont bien de la responsabilité directe de la DRH placée sous la responsabilité de la DGS ». Mohamed Ahmed, le DGS de la Région à l’époque répond : « je n’ai participé ni de près ni de loin au contrat de Yoland Velleyen. S’il y eu des anomalies, je n’ai pas eu de signalement concernant ce contrat ». Afzal Patel, DRH, dira : « je n’ai pas visé ce projet de contrat. En tout état de cause, le projet de contrat a été transmis dans le circuit habituel avec le visa de la DGA, secrétaire générale, de la DGS et notamment du cabinet auprès de qui cet agent était rattaché ».
Concernant le recrutement de ces chargés de mission et conseillers techniques, le DRH et le DGS ne cesseront durant les auditions, y compris celles de confrontation, d’affirmer que, soumis à l’autorité hiérarchique du président et du cabinet, organe politique, ils ne pouvaient s’opposer à un recrutement exigé par le président directement ou indirectement via son cabinet. Afzal Patel a expliqué aux enquêteurs qu’il avait « une obligation d’obéissance » et qu’il ne pouvait « désobéir qu’en présence d’un acte manifestement illégal et qui était de nature à compromettre gravement un intérêt public ». Didier Robert et Vincent Bègue se sont inscrits en faux à cette affirmation du DRH, précisant que la responsabilité des procédures de recrutement incombe au DRH, au DGS et au secrétariat général. Il en veut pour preuves, les alertes lancées par ces derniers à propos de l’embauche de Sabrina Ramin et de Fabrice Marouvin.
Réponse du DGS : « les propositions de recrutement n’ont jamais fait l’objet d’un visa de la DGS concernant les 8 personnes sur lesquelles vous m’aviez interrogé », dira Mohamed Ahmed à la police. Afazal Patel explique que « la DRH ne pouvait s’opposer à une décision de recrutement ». Les 8 personnes concernées étant : Yoland Velleyen, Alfred Ablancourt, Ismaël Aboudou, Yves Ferrières, Yannick Gironcel, Jean-Charles Maroudé, Sabrina Ramin et Ravy Vellayoudom. Est-ce à dire que ce sont ces personnes qui seront appelées à comparaître ? Personne ne peut y répondre pour l’instant. La police a souhaité savoir quelle était la plus-value de ces recrutements pour la Région, à l’instar par exemple de Ravy Vellayoudom qui, face aux policiers, a reconnu « ne pas avoir de bureau, ni d’horaire ». Les enquêteurs écriront « qu’il n’a pas été en mesure de justifier la réalité de son emploi si ce n’est pas la production d’une note sur un voyage aux Comores qu’il avoue lui même ne pas avoir fait ».
Le DGS et le DRH chargent Didier Robert et Vincent Bègue
Rappelons que durant l’enquête, outre les quelques personnes citées ci-dessous, les policiers ont cherché des billes également sur l’ensemble des personnes recrutées comme chargés de mission ou conseillers techniques parmi lesquelles Eric Ferrère (aujourd’hui maire des Avirons), Philippe Jean-Pierre, Jean-Luc Julie, Imrhame Moullan, Max Daniel Alamélou, Ranjit Camalon, Kévin Bundervœt, Caroline Lim, Pierre Adnot, Aymeric Girardet, Laurent Bridier, Vincend Defaud, Sabine Maillot-Faubourg, David Rivière, Johan Siby, Joann Hoareau, Emmanuel-Luc Doulouma, Séverine Dargent, Patrick Florès, Philippe Le Claire, Gaëtan Adam, Cécile Affejee, Anicha Lebeau, Rémy Massain…
Après le contrôle effectué par la Chambre régionale des comptes concernant la gestion du personnel, un service administratif de l’autorité (SAA) avait été créé en 2019 dans le cadre d’une gouvernance partagée au niveau de l’administration pour ventiler le nombre de chargés de mission et de conseillers techniques. Le but étant surtout de désengorger un cabinet pléthore sérieusement montré du doigt par les gendarmes des collectivités. Le SAA était dirigé par Bruno Faustin. Ce dernier a laissé entendre auprès de la police (c’est écrit dans les PV d’audition) : « il était de notoriété publique que les personnes du SAA travaillaient pour le cabinet ». Pour tous les postes considérés comme « injustifiés » par la CRC, le préjudice potentiel a été estimé à 1,4 million d’euros. Des anomalies pouvant constituer les infractions de détournements de fonds publics, faux en écriture publique et prise illégale d’intérêts. On en saura plus lors du procès, l’année prochaine.
En attendant, je retiens que pour toutes ces personnes citées ci-dessus, le DRH et le DGS ont insisté sur le fait que tous deux n’avaient rien à voir dans ces recrutements « directement rattachés au cabinet ». En guise de conclusion, le DRH de l’époque, Afzal Patel, a même confié aux enquêteurs : « je voudrais réaffirmer le fort sentiment d’injustice qui m’habite aujourd’hui d’être associé à cette enquête même si je prendrai ma part pour la manifestation de la vérité. Pour la question d’une éventuelle complicité dans des recrutements qualifiés de politiques, j’affirme que je n’étais ni de près ni de loin le complice de qui que ce soit. Je dois mes fonctions de DRH à mes seules compétences et expériences. Je n’ai jamais fait état de mes opinions politiques dans le cadre de ses fonctions car je mets un point d’honneur à respecter le principe de neutralité en faisant preuve d’une probité à tous les instants».
Idem pour l’ancien DGS Mohamed Ahmed : « j’ai le même sentiment que celui de Monsieur Patel, collaborateur qui a une grande expérience et qui a servi la collectivité de façon professionnelle. S’agissant des huit personnes en cause dans le cadre de cette enquête, je tiens d’une façon solennelle à dire que je n’ai pas participé aux procédures de recrutement de ces personnes. Je n’ai pas été destinataire de proposition de recrutements. Je n’ai pas reçu d’alerte sur l’effectivité du travail de ces personnes, je n’avais aucun élément pouvant mettre en cause l’effectivité de ces contrats ». En clair, comme Pilate, dans cette affaire d’emplois de cabinets de la Région, le DGS et le DRH s’en lavent les mains. Un peu comme s’ils disaient à l’ancien président Didier Robert et à l’ancien dir-cab Vincent Bègue, « démerde à zot » !
Pour finir, je voulais dire à Géraud-Geoffroy Legros, l’éditorialiste provisoire ou temporaire du JIR, auteur de ces quelques lignes ci-dessus que m’a envoyées une amie car moi je n’achète plus ce journal depuis longtemps que : et d’un, il a mal orthographié mon nom. C’est « Mont-Rouge » et non « Montrouge ». Et de deux, je n’ai jamais été « viré » du JIR mais, après 32 ans de carrière dans ce journal, j’ai demandé une rupture conventionnelle. Un bon journaliste doit toujours vérifier ses sources « camarade ». Le compagnon de Sandrine Aho-Nienne, conseillère régionale de l’opposition et adjointe au maire de Saint-Pierre (jusqu’en 2026) n’a pas apprécié que je commente les interventions de sa « madame »(élue politique donc personnage public) lors de la dernière session plénière. Donc, il s’attaque à moi directement sous forme de chantage. Dis moi qui tu fréquentes et pour qui tu écris, je te dirai qui tu es ! Franchement pitoyable ! Il se sert de son média pour régler ses problèmes perso, voire familiaux pour ne pas dire conjugaux. On m’avait en effet envoyé, il y a quelques temps, une double pages de lui (l’édito provisoire du samedi) dans lesquelles il flinguait la directrice générale de Pôle Emploi, patronne de sa « madame ». Un règlement de compte personnel, rien que ça ! Mon cher GGL, si je n’ai pas « vidé mon ordinateur professionnel » comme tu le laisses entendre, je n’aurai qu’un petit conseil à te donner : il faut publier ce que j’y ai laissé dedans. Vas-y, ne sois pas lâche, s’il te plaît !
Y.M.
Comment here